C’est assez rare pour le souligner, mais oui, Bercy accueillait bien un concert de punk rock en ce jeudi 25 mai avec la présence de The Offspring. Le groupe, qu’on a souvent pu retrouver en festival ces dernières années, n’était plus apparu en salle française depuis 2012. On ne peut pas dire que le groupe avait laissé à chaque fois une grande impression lors de ses derniers passages et j’étais vraiment curieux de voir ce qu’allait donner ce concert des Californiens dans une Accor Arena à guichets fermés pour l’occasion. Mais j’étais aussi très impatient de voir les deux premières partie de la soirée: Trash Boat et surtout Four Year Strong.
C’est Trash Boat qui entame donc la soirée vers 19h30. Le groupe avait déjà officié à Paris comme première partie en décembre dernier lors du passage d’Enter Shikari au Trabendo. La salle est plus grande et le public est déjà nombreux mais je suis à nouveau convaincu par la prestation du groupe qui distille avec justesse son pop-punk teinté d’influences emo et hardcore. Dans une salle où Linkin Park s’est régulièrement produit, Trash Boat rend un bel hommage à Chester Bennington avec sa reprise de Given Up, dont le groupe avait enregistré une version en studio dans le cadre de la compilation Songs That Saved My Life. Je suis tout de même un peu déçu de ne voir dans la setlist que des morceaux issus du dernier album du groupe Don’t You Feel Amazing? (2021). Le troisième album du groupe est un bon album mais j’apprécie particulièrement Nothing I Write You Can Change What You’ve Been Through (2016) qui contient les morceaux Strangers et Tring Quarry que j’aurai aimé retrouver dans la setlist du soir.
C’est ensuite Four Year Strong qui débarque sur scène et il s’agissait du concert que j’attendais le plus de la soirée. Depuis l’annulation de l’édition parisienne du Slam Dunk 2020 où ils étaient initialement prévus (avec Trash Boat également d’ailleurs), le groupe n’était pas revenu en France. Il fallait donc remonter à 2017 pour retrouver trace d’un passage de Four Year Strong sur notre sol. J’aurai évidemment préféré voir le groupe en tête d’affiche mais je ne boude pas mon plaisir de les voir jouer tout de même 45 minutes. 45 minutes pendant lesquelles le groupe jouera bon nombre de ses classiques à commencer par It Must Really Suck to Be Four Year Strong Right Now qui ouvre le show mais également Heroes Get Remembered, Legends Never Die et son refrain fédérateur et iconique :
Sad enough to say that alone I could barely light a match
But together we can burn this place down
La performance du groupe est plus que convaincante et l’alternance de chant entre Alan Day et Dan O’Connor, les deux chanteurs de la bande, renvoie l’impression d’une très bonne synergie et d’une complicité. Le groupe s’adonne également à une reprise avec l’enchainement Brain Stew / Jaded de Green Day. La musique du groupe, qui mixe des mélodies pop-punk avec des éléments plus heavy issus du hardcore voire du metalcore (dans un style qu’on appelle easycore), se prête parfaitement à la performance live et les originaires de Boston nous l’ont prouvé ce soir.
Bien que le public ne semblait pas particulièrement familier avec ces deux premières parties, on peut souligner et approuver le choix de ces groupes, alors que The Offspring auraient pu se contenter de s’appuyer sur leur notoriété et ne pas s’embêter à rechercher des premières parties pertinentes comme celles de ce soir.
A peine le set de FYS terminé que se met en place le show que constitue l’entracte. Une kiss cam, un dirigeable estampillé du logo de Offspring, une booty cam, un singe qui propulse des t-shirts dans la foule, un décompte avant le début du concert, et le tout sur une bande son choisi judicieusement pour ambiancer tout le monde… Je n’ai pas souvenir d’un autre concert où l’on nous propose de telles animations et sans trouver ça révolutionnaire, l’idée reste sympathique et permet de faire passer le temps un peu plus rapidement. En tout cas, pour ceux qui n’étaient pas au courant, The Offspring est bien un groupe américain.
Le compte à rebours enfin terminé, les californiens débarquent avec Come Out and Play, qui met de suite une grosse ambiance parmi le public. Je suis aussi tout de suite rassuré par la prestation musicale : ça joue bien, le son est bon et Dexter maitrise son chant. Il n’y aura d’ailleurs rien à redire de ce côté là tout au long du concert et cela redorera un peu l’image ternie que j’avais de la performance du groupe en live. Le grand écran qui avait été bien utilisé lors de l’entracte le reste pendant le concert et on y voit défiler des images rappelant les clips ou les univers des morceaux.
La tournée étant intitulé Let the Bad Times Rolling Tour en référence au dernier album du groupe (2021), on retrouve quelques morceaux issus de cet album notamment le très sympathique We Never Have Sex Anymore et sa mélodie très ska à base de trompette et de trombone (qui sera joué depuis un sample malheureusement). Cet album étant plutôt réussi et attendu depuis 2012, le groupe aurait pu lui faire un peu plus de place dans la setlist du soir. A la place, le groupe préfère jouer la sécurité en enchainant les classiques du groupe. Et il y en a beaucoup! Le groupe peut s’appuyer sur un répertoire fourni en morceaux iconiques, parmi lesquels on peut citer Hit That, Why Don’t You Get a Job? ou Pretty Fly (For a White Guy). L’interprétation de Gone Away dans sa version piano (qu’on retrouve dans le dernier album du groupe) représente un autre moment fort du concert. L’écran étoilé derrière Dexter conjugué aux flashs du public crée une magnifique atmosphère, mais la lumière la plus brillante reste la magnifique performance vocale de Dexter sur ce morceau. Un morceau d’autant plus touchant qu’il évoque le deuil et la perte d’êtres proches.
Le show connait tout de même un temps faible d’au moins 15 minutes pendant lesquelles le groupe ne performera aucun morceau. Au lieu de ça, on aura le droit à de longues discussions humoristiques entre Dexter et Noodles. Les concerts de punk rock sont souvent saupoudrés d’humour mais je préfère lorsque cet élément est ajouté par ci par là entre les morceaux. En plus de ces discussions un peu longues, on a également droit à des reprises de célèbres riffs par Noodles. J’ai du mal à voir l’intérêt de faire ça, si ce n’est de flatter l’égo du public, qui se sent peut-être extrêmement cultivé de reconnaître la mélodie de Sweet Child o’ Mine. Plus sérieusement, j’imagine qu’il s’agit d’un moyen pour Dexter de pouvoir souffler un peu backstage. Ce temps mort me laissera d’autant plus un goût amer que je trouve la setlist pas suffisamment fournie. Un concert de punk rock d’une heure trente est généralement suffisant mais je reste sur ma faim avec seulement une vingtaine de morceaux joués : mis bout à bout, les morceaux joués dépassent tout juste l’heure… Bref on aurait pu en avoir un peu plus. Le set se termine sur le cultissime The Kids Aren’t Alright, l’occasion de se rendre compte que 25 ans après, une partie du public n’est toujours pas au courant qu’il ne faut pas chanter « Woah-oh » à la fin de toutes les phrases du couplet…
Le dirigeable refait son apparition et laisse entrevoir la mention « Dance Fucker Dance » sur son aileron arrière, c’est donc sans surprise mais pour notre plus grand plaisir que la bande à Dexter et Noodles revient sur You’re Gonna Go Far, Kid. Le public jette ses dernières forces dans les pogos ou dans ses cordes vocales sur ce titre et sur le suivant, Self Esteem, qui clôtura une très belle soirée.
Rarement cité comme un groupe taillé pour la scène, The Offspring a pourtant proposé au public parisien un concert plus que satisfaisant, dans lesquels les grands classiques du groupe auront été joués avec justesse et enthousiasme. Accompagné de deux très belles premières partie, le groupe a prouvé qu’il était sans doute plus à l’aise en salle qu’en festival.
