Magoyond : Interview avec le groupe au Hard Rock Café

 

Le 9 Novembre dernier, j’ai pu rencontrer le groupe Magoyond pour discuter de leur nouvel album dans le cadre chaleureux du Hard Rock Café de Paris. Retour sur l’univers du groupe, leur processus créatif et leurs plans futurs.

 

Bonjour ! J’ai beaucoup entendu parler de vous, mais en réalité je ne suis pas très familière avec votre musique. Donc je me demandais, si vous deviez introduire le groupe à quelqu’un qui ne le connait pas du tout, comment vous vous y prendriez ?
Le Mago : Donc on va essayer de te vendre le groupe alors ! Magoyond c’est un groupe de metal, qui chante des chansons en français sur la thématique de la fin du monde et des monstres. Chaque chanson raconte une histoire et s’inclut dans un même univers plus global et qui englobe tout le groupe. Cet univers, on l’a développé sur 3 albums pour l’instant : Pandemia, sorti en 2012, Kryptshow, en 2019 et maintenant Necropolis qui vient de sortir il y a une semaine. Chaque chanson raconte donc une histoire, et suit un personnage ou un lieu emblématique dans cet univers. Elles rajoutent toutes une petite pierre à l’édifice sur notre world building et elles ont toutes leur propre style musical, leur ambiance et leurs particularités. C’est vraiment un groupe de concept albums, et nos thématiques sont traitées de manière très cinématographiques : on s’inspire de la mort à la Tim Burton, les films de Guillermo Del Toro, de leurs monstres…

 

Et donc comment vous sont venues les idées de faire ce genre d’albums à la base ? Qu’est-ce qui vous a fait dire que vous traiteriez de ces thèmes là spécifiquement ?
Le Mago : Ça a été très progressif. Sur notre premier album, Pandemia, l’idée même de faire des chansons sur les monstres est arrivée parce que j’ai écrit une chanson qui s’appelle Adopte Un Zombie. J’avais regardé Shaun of the Dead, le film. Au début les chansons partaient un peu dans tous les sens, on passait d’un mec overbooké qui travaille trop à des aliens dans l’espace. Y’a eu un avant et un après la création de la chanson Adopte un Zombie. Dans le film Shaun of the Dead, à la fin, y’a une scène où ils jouent dans une cabane de jardin avec un zombie et j’ai trouvé ça rigolo alors j’ai commencé à écrire dessus.
Aspic : Tout est parti de l’idée que c’était la fin du monde, y’a des zombies partout, mais c’est quand même rigolo. Tout s’est concrétisé en plusieurs chansons qui ont donné Pandemia, qui est sorti le 21 décembre 2012, jour supposé de la fin du monde pour les Mayas, ça faisait sens.
Le Mago : Ensuite dans Kryptshow, 7 ans plus tard, on a vraiment tout le côté fin du monde, qu’est-ce qui s’est passé pendant 7 ans après la fin du monde, et ce laps de temps nous a aussi permis d’affiner le style du groupe. Avec l’arrivée de Vito en 2014, on a vraiment pris un tournant metal, vu qu’avant on faisait du rock qui partait un peu dans tous les sens. Avec Necropolis maintenant, on pose vraiment nos bases. On montre qu’on fait du metal, mais qu’on a aussi un orchestre symphonique, un chœur symphonique et beaucoup plus de moyens. On va plus loin dans le côté lourd, fantastique et immersif de la musique.

 

Donc les albums se suivent comme une grande histoire ?
Le Mago : Oui, mais les chansons peuvent aussi être prises indépendamment sans problème. Cependant, il y a une histoire de fond, un univers de fond, dont il faut être conscient. L’histoire se passe à Magoyond ville dans le premier album, qui évolue en Necropolis sur le dernier album. On a cette ville qui est le centre de l’histoire, il se passe des choses et c’est l’épicentre de la fin du monde. Y’a des monstres, y’a de plus en plus de monstres, donc ils finissent par tout détruire pour construire une ville spécialement pour les monstres. C’est comme ça qu’on peut résumer l’histoire !
Aspic : C’est à la fois un concept album, et à la fois pas. Je dirai que le concept il est dans tous les albums, car les chansons se croisent et il y a des thèmes qui reviennent, mais les chansons peuvent être écoutées complètement indépendamment, elles ne sont pas reliées musicalement et c’est pas forcément fait pour être écouté dans l’ordre comme une piste découpée en chapitres. C’est juste qu’elles se succèdent dans le temps, dans la chronologie de l’histoire.
Le Mago : En gros faut voir ça comme un recueil de nouvelles, l’album se base sur un univers mais chaque chanson est un nouveau texte qui va aborder un lieu, un personnage, une thématique. C’est très littéraire comme approche. Même la conception des albums, les artworks, sont tous construit pareils. On a la grande fresque centrale et les éléments autour. On essaie de construire l’image du groupe comme une suite d’ouvrages.

 

 

Magoyond, le nom du groupe, c’est donc le nom de la première ville ?
Le Mago : On peut dire ça. En vrai, c’est un mélange des noms des deux créateurs du groupe, Mago et Yond, avant que ça devienne un vrai groupe de musique. On aurait pu changer ça y’a 15 ans mais on ne l’a pas fait, et aujourd’hui c’est devenu la base d’un univers. Mais le mot Magoyond ne veut rien dire.

 

Pourquoi avoir choisi de développer un univers basé sur une apocalypse et des monstres ?
Le Mago : C’est un univers dans lequel on était à l’aise pour écrire et raconter des histoires. C’était rigolo. Plus on a évolué musicalement, plus on s’est rendu compte qu’il y avait des accroches cinématographiques fortes, et avec le metal et avec des ambiances spécifiques on pouvait vraiment faire passer des émotions et des histoires. Ça a vraiment été naturel.
Aspic : Quand on se base sur un univers comme ça, que tu crées au fur et à mesure, il y a toujours beaucoup de choses à raconter et donc les idées viennent beaucoup plus facilement. C’est pas des paroles aléatoires, on écrit pas des textes profond en anglais, on veut pas juste être un groupe de metal. On raconte vraiment notre histoire et avoir un univers spécifique c’est vraiment une grande source d’inspiration.
Le Mago : Comme on se base majoritairement sur la pop culture, les films, la littérature, tout ça, l’inspiration est quasiment illimitée. On a accès à tous les monstres du cinéma, les faits divers, etc. Si on prend un élément, qu’on le transforme et l’inclut dans notre univers, il va trouver sa place. Ca nous permet d’avoir énormément de créativité. Ces albums, c’est un arc narratif sur 10 ans qui se passe au même endroit. Plus tard, on peut juste dézoomer, décider de prendre un autre point sur la planète et raconter d’autres histoires. On est toujours dans cette ambiance de fin du monde et d’apocalypse, mais on peut décider ce qu’on veut. Ça nous permet aussi de faire des métaphores sur ce qui se passe en vrai sur notre planète, bien qu’on ne souhaite pas du tout être politiques ou quoi, mais ça centre bien notre histoire.

 

Comme vous développez énormément un univers précis, avez-vous prévu d’exporter vos histoires au-delà de la musique, dans des films, des livres… ?
Le Mago : Oui on aimerait bien ! C’est un peu ce qu’on essaie de faire. C’est surtout une question de moyens. Mais on fait de la musique avant tout.
Aspic : On a commencé un peu sur les deux derniers clips qu’on a sorti récemment : Goliath Paradise, un lieu dans Necropolis qu’on a filmé dans un vrai cabaret avec des figurants et tout, qui se met très bien en place dans notre univers avec notre imagerie, ainsi que l’Ordre de l’Ombre, un clip d’animation 3D, le premier single qu’on a sorti début juillet. On voit ici une autre facette de l’univers. Et on a également sorti des lyrics vidéos, y’en a une par semaine qui sort en ce moment, où on a un joli rendu visuel de notre univers. Le problème, c’est que pour nos musiques, si on veut faire un vrai clip cinématographique, c’est tout de suite des budgets délirants. Si tu parles d’une ville en flammes avec une armée de zombies, tu peux pas faire un clip avec juste des bouts de ficelles ce serait ridicule. Mais on aime beaucoup avoir un univers multimédia, on essaie.
Le Mago : On a beaucoup d’illustrations aussi, on travaille avec Arsenic et Boule de Gomme pour les réaliser. Ils cernent à chaque fois, pour chaque album, le propos et l’image qu’on veut donner. Ca fait très comics noir, à l’ancienne, un peu trash, et c’est à l’image de nos musiques.
Aspic : Et on a plein de produits dérivés : on a des tickets d’entrée pour Monstapark, le parc des monstres, des billets d’argent de la monnaie de Necropolis, le billet d’entrée pour le cirque du Chapiteau des Supplices, du cabaret de Vegas Zombie, le billet de train du Death Train pour aller à Necropolis, des billets d’entrée au Goliath Paradise avec des tickets à gratter. On a même une carte de notre univers, décorée avec des sponsors qu’on crée pour nos chansons, on y voit tous les lieus décrits et utilisés dans nos chansons, qui synthétise tout ce qu’on apprend dans les 3 albums. On a des autocollants, on a des vinyles avec les artworks en gros, c’est joli, ça fait collection. Ces goodies son offert avec les albums pour que tout le monde puisse avoir une expérience complète.
Le Mago : On a certains packs. On peut avoir juste le CD sans goodies, mais on sait que le metalleux est souvent un peu collectionneur, surtout quand on baigne dans la pop culture. Comme on est graphistes aussi, on est capable de donner vite à notre univers visuel, Vito est chef op aussi donc on peut réaliser nos propres clips, on produit nous-mêmes notre musique… Au final on est un studio de création complet au service de l’univers qu’on a envie de créer, qui est ce truc un peu horrifique un peu rigolo. Même si on ne baigne pas toujours dedans, on ne regarde pas des films d’horreur tout le temps ou quoi, mais créativement parlant c’est un axe très marqué qui offre beaucoup de libertés de créations. On aime les supports physiques, on n’a jamais vendu autant de CDs, que depuis qu’on fait de beaux objets. C’est un tout et on réfléchit à chaque détail visuel.

 

 

Vous avez l’air de tout faire pour que votre univers soit vraiment très facile d’accès. Comment vous intégrez vos reprises (Soyez Prêtes, le Pudding à l’Arsenic…) dans cet univers, et comment vous sélectionnez ces morceaux ?
Aspic : Pour faciliter encore plus l’accès à notre univers, on a effectivement fait 2 ou 3 covers. Par exemple, la reprise de Soyez Prêtes, de Scar dans le Roi Lion, une reprise en metal donc. Ça a très bien marché et c’est une excellente porte d’entrée à la fois dans notre univers et dans le concept de Necropolis. Ça a servi à introduire le financement participatif qu’on a lancé il y a un an, on a juste changé un mot par rapport à l’originale, et on l’a transformée en metal un peu symphonique. C’est une chanson facile d’accès, car c’est facile d’aller la faire écouter à ton pote, si tu veux lui faire découvrir Magoyond mais que ne t’arrives pas à lui pitcher le concept, car y’a beaucoup de styles et de choses à dire.
Le Mago : On ne fait pas des reprises gratos, il faut vraiment que ça puisse s’inclure dans notre univers. Le Pudding à L’Arsenic était une fulgurance, je me suis dit « il faut trop qu’on la fasse ! » et même si les autres étaient un peu sceptique au début, ça a super bien marché. On a presque 700 000 vues sur Youtube avec et 1.3 millions sur Spotify. C’est invraisemblable. Pour Soyez Prêtes, on savait qu’on mettant le doigt dans l’engrenage des covers, les gens allaient nous réclamer d’autres reprises. Cette cover nous avait été suggéré il y a quelques années, et on avait refusé, on n’en voyait pas le besoin, ça ne nous plaisait pas sur le moment. Pendant le confinement, quand on a écrit le pitch de Necropolis, l’idée est revenue sur la table et on a trouvé que maintenant c’était super en raccord avec le propos de Necropolis. On a testé, on l’a sortie, et ça a marché donc on s’est dit que c’était le bon propos au bon moment. On essaie de valoriser les reprises et leur donner du sens, pas juste en faire à la pelle pour se faire connaitre, on fait en sorte que ce soit vraiment approprié avec notre thème. La reprise du Donjon de Naheulbeuk est à part, on l’avait reprise il y a très longtemps, parce que c’est des potes et parce qu’on s’éclatait à la jouer en live. Elle n’est jamais sortie sur un support physique. Mais ça reste une porte d’entrée sympa pour tous ceux qui apprécient le Naheulband.

 

Si vous pouviez choisir sur l’ensemble de la discographie une ou deux chansons pour décrire le mieux le groupe et son contexte, lesquelles vous choisiriez ?
Aspic : Le Chapiteau Des Supplices.
Le Mago : Je suis d’accord. C’est vraiment l’invitation à rentrer dans un univers qui est à la fois beau et très creepy. Ça représente bien notre concept. Après, n’importe laquelle du dernier album, je ne saurais pas dire…
Aspic : Sur le dernier album, ce serait le Charnier des Epouvantails. On est tous à peu près d’accord pour dire que c’est notre préférée de l’album. Mais suivant l’interlocuteur qu’on a en face de nous, on sait qu’il va avoir une sensibilité différente, on pourra conseiller plutôt Le Village ou Goliath Paradise.
Le Mago : Mais oui, pour parler de l’univers et du concept en général, c’est Le Chapiteau des Supplices qui va mettre tout le monde d’accord, c’est un bon résumé. L’instrumentation lourde et rythmé, le conteur qui te raconte une histoire, les chœurs, l’ambiance un peu gentil et rigolo dans l’apocalypse. Mais sinon oui, pour Necropolis, ce serait l’album entier qui nous représente.

 

Quelles chansons vous amuse le plus à jouer en live ?
Aspic : Je pense que comme on vient de sortir des nouvelles musiques, en ce moment on s’éclate davantage à jouer le dernier album. Je dirais Le Charnier des Epouvantails, le Village et Goliath Paradise. Même si le Chapiteau des Supplices ne me lassera jamais.
Le Mago : On évolue quand même musicalement entre chaque album, et les dernières sorties sont les morceaux qui représentent le plus de challenge. Certaines musiques, on les a jouées pendant 10 ans donc on en a un peu marre. C’est difficile car on a beaucoup de coups de cœurs, on crée nos playlists avec nos chansons préférées et celles qu’on a envie de jouer. Certaines chansons sont là tout le temps, mais on varie quand même un peu. On adore les chansons où le public peut chanter où on peut avoir une connexion avec le public : Croque-Mitaine par exemple crée vraiment une connexion en live.

 

 

Vous avez des tournées de prévu pour promouvoir cet album ?
Aspic : On a quelques dates par ci par là, on joue à Paris, Rennes, on va aller à Bordeaux fin Janvier, à Lyon en Février… Le mieux c’est de regarder notre site internet pour connaître les dates. On a aussi prévu Toulouse, la Belgique…
Le Mago : En fait, on n’a pas de tourneur, donc on est tributaire des invitations qu’on peut recevoir. Mais on aimerait tourner beaucoup plus, c’est sûr.

 

Vous avez tourné avec le Naheulband récemment…
Le Mago : Oui, après on est deux groupes qui fonctionnent pareil, on ne tourne pas beaucoup, on fait environ une date par mois. Perso, je suis dans les deux groupes, donc c’est facile, mais à chaque fois c’est devant un gros public, plus de 1000 personnes. C’est bien, c’est déjà un public acquit à la cause si on peut dire, ils sont geeks, ils comprennent ce que l’on fait, ils vont avoir l’ouverture pour le metal et les textes en français. Ce n’est pas simple, je sais qu’en festival souvent le chant en français est boudé. Mais voilà, on joue toujours dans notre sphère et on aimerait bien s’ouvrir un peu plus au monde du metal en général, on veut prouver qu’on a quelque chose de nouveau à défendre. Ca reste notre plus gros défi, trouver des portes d’entrée dans des festivals plus grands et plus metal, qui acceptent de nous faire jouer.

 

On va finir là-dessus, merci beaucoup ! Si vous avez un dernier mot à faire passer, c’est le moment.
Le Mago : Merci à ta collègue pour sa chronique de Necropolis, ça nous a fait très plaisir. Et voilà, on espère qu’on va pouvoir jouer davantage, un peu partout en France, et qu’on va pouvoir rencontrer plein de nouveaux fans ! On est un groupe indépendant, mais on a la chance de pouvoir exister en 2022 sans compter forcément sur un label, et on remercie infiniment les fans qui ont participé au financement participatif qu’on a lancé. On a pu rassembler 62 000 euros pour 1 million de précommandes, c’est les plus gros chiffres qu’on ait pu avoir ! Donc vraiment, merci à tous !

 

 

Tracklist :

01. Prélude
02. L’Ordre de l’Ombre
03. Le Village
04. Le Charnier des Épouvantails
05. L’Avènement du Nécromant
06. Necropolis
07. Goliath Paradise
08. Monstapark
09. Catacombes
10. L’Éveil des Titans
11. Soyez Prêtes

 

 

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