Annisokay – Aurora

 

Annisokay est un groupe allemand de post-hardcore/metalcore actif depuis 2007. Aurora, sorti le 29 janvier 2021, est le cinquième album du groupe. C’est également le premier album qui voit apparaître Rudi Schwarzer, le nouveau screamer de la bande. Le son se décrit comme une continuité de leurs précédentes productions : on retrouve en effet la patte du groupe mélangeant les riffs lourds à des éléments électro, accompagnés du chant clair de Christoph Wieczorek, reconnaissable entre mille. Le changement de screamer n’entache rien et apporte même une touche encore plus agressive qu’auparavant. Quelques nouveautés et mélanges de genre viennent également s’inviter pour diversifier les créations.

Les sujets évoqués sont toujours aussi ancrés dans la réalité, comme nous l’indiquait Christoph dans notre Interview, qui aime écrire sur ce qu’il se passe autour de lui et ce qui le révolte. Dans l’ensemble, cet album saura satisfaire les fans du groupe et du style, sans pour autant révolutionner le genre. J’ai personnellement beaucoup aimé certaines chansons malgré une certaine inégalité entre les morceaux.

 

 

L’album débute par la chanson Like A Parasite. Les riffs lourds résonnent dès le début, ponctués par le scream agressif de Rudi et quelques touches électroniques. Christoph chante refrains d’une manière claire et larmoyante. Le sujet est porté sur la réalisation d’une relation toxique, du point de vue de la personne abusée qui doit partir pour se protéger. On alterne les phases d’accusation et de rage, d’abord au présent « You feed yourself while I starve » puis au passé « You were faking, simulating », qui montre l’évolution de la pensée du personnage. Les pré-refrains laissent un peu retomber la rage pour une phase d’acceptation « I leave you behind before you bleed me dry » qui apaise un peu la musique et amorce le chant clair. Les refrains explosent à nouveau juste après, traduisant les regrets du personnage « We built this world for you » avant d’arriver à la phrase phare qui donne son titre au morceau « You bleed me dry like a parasite ». Il s’agit d’un de mes morceaux préférés, et une excellente introduction au reste de l’album.

STFU, véritable coup-de-gueule contre les fake news et la stupidité des gens sur internet, se démarque au début par des petits accords de guitares tranquilles sur un scream en écho. Par la suite rejoint par le chant clair quand le rythme s’accélère, le tout se calme pour les couplets, chantés cette fois-ci par Christoph d’une manière un peu exaspérée. Ce morceau est une alternance constante entre le scream et le chant clair. Commençant par des questions pour interroger l’auditeur « Do you still believe the myth? » avant de leur donner la réponse d’une manière assez brutale « It was all just a load of bullshit, born of the fake fucking news », les paroles s’articulent comme une leçon que chacun doit recevoir pour traîner sur internet en pleine conscience. Les pré-refrains criés dénoncent la vérité alors que le rythme s’accélère « It is easy to see a conspiracy when the world is full of hate » avant que les refrains, au chant clair également, ne viennent apprendre comment appréhender les nouvelles sur le net « Never just believe any old shit you read, never just repeat what someone else believes ». La conclusion du refrain arrive de manière violente dans un cri énervé alors que le son devient très lourd, appuyant la baffe donnée à ceux qui diffusent des fakes news « Shut the fuck up now! And start using your own brain ».

 

 

Le troisième morceau intitulé The Tragedy parle d’une fille qui se complait dans sa peine et qui le fait se répercuter sur tout le monde autour d’elle, gâchant probablement sa vie par la même occasion. Le morceau est assez intéressant par son rythme et son instrumentation aux sonorités davantage pop voire hip-hop, ponctué par le chant de clair quasi constant, le scream n’étant présent qu’en arrière-plan pour appuyer certains passages, et se retrouvant au premier plan seulement pour une petite partie des paroles qui intervient notamment à la fin, sonnant très fatalistes « And life is what you make it, some people they were built for this, and some people just aren’t ».

L’enchaînement avec Face the Facts est très rapide et nous emporte sur un riff de guitare assez saccadé. Assez classique dans sa composition, ce morceau enchaîne les couplets criés, avec de petits pré-refrains chantés suivis par les refrains criés à nouveau, tandis que le bridge va calmer le ton pour redonner de la place au chant clair. Quelques effets électro sont parfois utilisés sur les voix pour accentuer l’effet décousu du morceau. Globalement, en parlant d’assumer nos actes et de sortir de notre zone de confort pour agir, il fait le job sans pour autant être le plus marquant de l’album. Overload, quant à elle, met davantage l’accent sur l’aspect électro-futuriste de la musique du groupe. Beaucoup d’effets sont utilisés, pour les instruments comme pour la voix jusqu’à ce qu’elle soit déformée de manière robotique. Le scream est absent et n’intervient que sur la fin en arrière-plan pour accentuer le passage. Le sujet d’un espèce de burn out est évoqué, quelqu’un qui veut agir car il a trop encaissé. Le morceau est assez court et intéressant en terme d’expérimentations musicales.

 

 

Chanson phare, Bonfire Of The Millennials arrive au milieu de l’album. Mixant des éléments électros avec de bons rythmes et guitares, le chant clair est encore une fois plus important que le scream qui s’invite majoritairement sur le bridge. Le sujet s’inscrit dans l’air du temps avec le réchauffement climatique, accusant surtout la génération précédente (clairement énoncée comme les boomers) de reposer toute la responsabilité de sauver le futur sur la génération actuelle alors qu’ils ont pu tranquillement empirer les choses sans s’en soucier : « And your generation dines, but the next one pays the bill », ou encore « You always told me that I should think about the future as you threw it on the fire ». La façon de chanter accompagne parfaitement ce que la chanson dénonce. Bien pensée, elle s’écoute agréablement malgré la lourdeur du sujet.

The Cocaines Got Your Tongue est un morceau intéressant qui s’introduit sur des rythmes et sons un peu plus hip hop, accompagnés de la voix de Christoph qui s’essaie au rap. Les couplets contiennent majoritairement les beats électro et la batterie alors que la rythmique de la guitare s’efface au second plan. Le refrain est surtout basé sur un build-up musical où la rythmique est accentuée. Le plus « lourd » de la musique n’intervient qu’après le refrain pour une courte période de temps, comme sont normalement construites les chansons de style plus électronique. Le bridge voit quelques poussées de voix intéressantes, mais le scream est quasiment absent du morceau. Les paroles sont assez longues et riches au vu du style du morceau, et parlent surtout des effets et conséquences que la drogue peut avoir sur quelqu’un.

 

 

Under Your Tatoos est une chanson beaucoup plus violente, composée de nombreux screams, seuls les refrains étant chantés. Le breakdown est particulièrement intéressant et les cris sont plus intenses. Basiquement, elle parle des secrets (et des crimes) que la partenaire du protagoniste a pu faire dans le passé. Ce n’est pas la meilleure, mais elle reste sympathique. The Blame Game est, à mon avis, un peu plus intéressante dans la construction musicale, les guitares et la batterie tenant un bon rythme qui sait parfois se diversifier pour les besoin du morceau. Je regrette juste qu’il n’y ait pas plus de scream, même s’il est bien présent tout au long de la chanson. Les voix en arrière-plan ajoutent par ailleurs certains effets sympathiques, ainsi que les petites touches électroniques. Les paroles ne sont pas transcendantes et avec beaucoup de répétitions, et portent surtout le message de ne pas se tenir responsable des mauvaises actions des autres.

I Saw What You Did possède sûrement parmi les meilleurs riffs de l’album en démarrant par une super partie de basse, qui va se faire rejoindre par les guitares et s’amplifier tout le long du morceau. Chanson violente, lourde, riche et bien dosée, elle traite des prédateurs envers les femmes, du fait qu’on doit agir quand on en a conscience, qu’on en est témoin. Les cris sont riches et diversifiés. Une des meilleures chansons de l’album, dommage qu’elle soit si courte ! La transition douce vers Standing Still surprend, avec un paisible morceau de piano pour ce qui sera une des chansons les plus tranquilles de l’album. Piano et batterie composent les couplets et le build-up, rejoints par les autres instruments seulement pour les refrains. Entièrement au chant clair, Christoph sait pousser sur sa voix pour en faire des notes larmoyantes. On retrouve cependant une petite touche de scream à la toute fin, en arrière-plan, pour accentuer l’effet du dernier refrain. Les paroles sont mélancoliques et plutôt bien écrites sur ce morceau, l’effet désabusé collant parfaitement avec les choix d’instrumentation. On alterne entre les phases d’apathies douces des couplets « The sun goes down as the day surrenders to the night» avec les grandes phases de doutes sur la vie des refrains « Am I standing still? Why do things never happen how I think they will? ».

 

 

Les deux dernières chansons ne m’ont pas marquée plus que ça, pour l’instant. Friend or Enemy est assez classique, dans la composition aussi bien que dans les paroles. Je dirai que l’élément principal de cette chanson réside dans le breakdown qui est assez sympathique à écouter, mais il se fait attendre. La fin de la chanson est un peu plus puissante cependant. Terminal Velocity, quant à elle, est assez calme et s’introduit sur une mélodie tranquille et de guitare teintée d’effets électroniques disséminés en arrière-plan. Encore une fois, le chant clair est à l’honneur mais le scream a ses moments. Elle possède quelques passages intéressants, comme la guitare derrière le scream ou le chant du refrain assez poussé. J’apprécie également les quelques moments calmes qui jaillissent de temps en temps. Le sujet est plutôt triste, et fait face au désespoir face à tous les problèmes dans le monde actuel et s’articule comme une vraie réflexion qui évolue avec la chanson. Tout d’abord le protagoniste s’adresse à la vie en elle-même sur un ton plutôt objectif « Life has a way of humbling us all » mais bien vite c’est la désillusion qui s’en suit, concernant toute l’espèce humaine « We float like a feather but always end up on the ground » puis le désespoir face à la situation actuelle du monde avec des questions sur des choses où l’on se sent impuissants « How can a child have cancer? How can you call that karma? How can a war be civil?». Pour terminer, on revient sur la boucle objective de la vie mais avec un nouveau point de vue, qui n’est plus aussi positif « Life is a matter of faith to feel you’re not already dead ».

 

Pour conclure, je dirais que c’est un bon album pour les fans du genre et/ou des précédentes créations du groupe. Sans révolutionner leur style, Annisokay sait évoluer et proposer de nouvelles choses. Certaines chansons peinent cependant à se démarquer, et il est dommage de voir que les morceaux les plus impactant, ou qui semblent les plus travaillés, soient pratiquement tous mis au début, ce qui donne le sentiment d’une certaine longueur dans la deuxième moitié de l’album.

 

Tracklist :

01. Like A Parasite
02. STFU
03. The Tragedy
04. Face The Facts
05. Overload
06. Bonfire Of The Millenials
07. The Cocaines Got Your Tongue
08. Under Your Tattoos
09. The Blame Game
10. I Saw What You Did
11. Standing Still
12. Friend Or Enemy
13. Terminal Velocity

 
 

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