Du metal hypnotique au chaos industriel
Le deuxième jour du Festival 666 s’était ouvert sous un soleil de plomb qui n’avait rien perdu de sa vigueur. Ce samedi s’était distingué par une programmation dense, oscillant entre racines classiques et modernité assumée, permettant aux plus jeunes comme aux anciens de profiter une nouvelle fois de la journée à l’unisson.
Malgré une chaleur toujours plus écrasante, les festivaliers n’avaient pas déchanté. Crème solaire dans le sac : check. Lunettes de soleil : check. Bouteille d’eau : check. Ok, let’s go !
Th3ory
Notre première découverte du jour s’appelle Th3ory, un groupe qui marque d’emblée une rupture stylistique et visuelle. Avec son esthétique cyber assumée – masques à gaz fluo, combis tactiques futuristes, lentilles bleues – la formation déploie un univers rappelant parfois Cypecore mais dans une veine moins steampunk/mecha. Leur scénographie futuriste et leurs effets lumineux renforcent cette identité, apportant une vraie couleur au set. Musicalement, Th3ory mélange cybermetal, nu metal, hardcore, metalcore et électro, entre passages rappés et sons modernes. L’énergie est contagieuse : le groupe descend plusieurs fois dans le public et invite même une petite fille pleine d’énergie à monter sur scène, un moment fort qui restera gravé. Certains spectateurs se laissent happer par cette proposition hybride et rafraîchissante, d’autres restent plus réservés face à ce mélange audacieux.
Mais la prestation a aussi divisé. Certains spectateurs, comme Matt, ont adoré cette volonté de sortir du lot et d’apporter une touche résolument moderne et hybride. D’autres, comme Marion, ont trouvé que c’était « trop », avec une impression de set pas encore suffisamment rodé pour une scène de cette taille. Entre enthousiasme total et réserves, Th3ory a en tout cas réussi à faire réagir et à susciter des débats – ce qui est déjà une victoire. Quoi qu’il en soit, Th3ory a su marquer les esprits et imposer son intention d’innover.
Eight Sins
Eight Sins débarque pour notre séance de sport de la journée : circle pit, pogo, circle pit, jump, circle pit (oui, il y a eu beaucoup de circle pit 😜). Et pour cause : ils nous balancent leur thrash régressif en pleine caboche. Leur mélange thrash/hardcore déclenche une véritable tempête de poussière où pogos et headbangs s’ajoutent au chaos. Du fun, de la bonne humeur, des pits complètement barrés et du gros son : voilà le résumé de ce concert des déjantés de Eight Sins. Les musiciens ne laissent aucun répit, enchaînant les morceaux avec une intensité qui ne faiblit jamais. Pendant 45 minutes, c’est une branlée sonore et une séance cardio dans le pit. L’énergie débordante du groupe est contagieuse et une grande partie du public vit ce moment comme une décharge d’adrénaline. La poussière, les circle pits (encore), les faces du groupe, en particulier du chanteur (qui a fait rire Matt’ tout du long, renforcé par sa ressemblance frappante avec l’humoriste Alban Ivanov), les ballons de plage et l’invasion finale de la scène par le public auront mis une ambiance de feu et de bonne humeur. Un concert sans concession, calibré pour ceux qui aiment se défouler sans modération, et clairement une des belles surprises de ce festival !
Nightmare
Au tour de Nightmare de faire trembler la scène avec un heavy/power metal moderne teinté de passages plus thrashy, à la fois puissant et habité. Les pionniers du power metal français rappellent ici leur longévité et leur savoir-faire, offrant une atmosphère plus mélodique et structurée qui apporte une vraie respiration dans cette journée dominée par l’agressivité des groupes précédents. Derrière le micro, Barbara impose sa voix, mélange de puissance et de nuances cristallines, captivant un public happé par son énergie et sa présence. Les riffs massifs et les rythmiques taillées au cordeau donnent l’impression d’un rouleau compresseur lancé à pleine vitesse, contrasté par des mélodies accrocheuses qui restent en tête longtemps après. Entre la complicité avec le public, cette intensité jamais retombée et une prestation qui rassasie les amateurs de metal plus classique, le concert prend des allures de claque metal dont on ressort avec le sourire aux lèvres. Aujourd’hui, Nightmare a prouvé qu’il reste une valeur sûre de la scène heavy française, et qu’il a toujours toute sa place dans un line-up de cette envergure.
Fu Manchu
L’un des moments les plus attendus de la journée est sans doute Fu Manchu, présents en exclusivité française. Les Américains livrent un set massif, fidèle à leur réputation de géants du stoner. Leurs riffs épais installent une ambiance presque hypnotique, qui fait voyager le public bien au-delà de Cercoux. Leur prestation évoque un long road trip poussiéreux, porté par une cohésion avec le public. Une parenthèse hors du temps qui régale les amateurs de rock lourd et groovy.
Shaârghot
Pour clôturer la soirée, Shaârghot déploie un show digne d’un film post-apocalyptique. Costumes sombres, maquillages cyberpunk, chorégraphies millimétrées : tout respire le spectacle visuel et sonore, parfait pour une clôture. Shaârghot, c’est un show dont le concept à lui seul vaut le détour. Rempli de personnages hauts en couleur, chaque membre incarne son rôle avec perfection et énergie, comme habité par son personnage. Les costumes et décors renforcent l’immersion, tout comme l’intervention de figures qui viennent interagir directement avec le public : un show qui dépasse la frontière de la scène pour s’inviter parmi nous. Leur métal industriel, saturé d’effets et de beats lourds, secoue une foule encore pleine d’énergie malgré la chaleur et les heures accumulées. Les lights collent parfaitement aux chansons et aux mises en scène. Entre l’incarnation totale des membres, les décors et les ambiances propres à chaque titre, le résultat est un concert théâtral, explosif et ultra-énergisant, qui sait comment emporter son public avec lui. Avec ce set spectaculaire, le groupe transforme le site du festival en une véritable scène dystopique et conclut la deuxième journée sur une note marquante et parfaite pour une journée multiforme.
Sous une chaleur étouffante, cette deuxième journée du Festival 666 a viré à la fois à la séance de sport et au grand écart musical. Du heavy/stoner d’Overcharger et Fu Manchu à l’agressivité d’Eight Sins et leurs circle pits délirants, en passant par les ambiances planantes de 7 Weeks, la découverte cyber de Th3ory ou encore le heavy/power de Nightmare, la diversité était totale. Certains groupes ont divisé, d’autres conquis, mais tous ont apporté leur pierre à l’édifice de cette édition.
Mat’ & Marion