Une nuit pour recommencer
Il y a des soirs où la musique n’entre pas dans la salle : elle l’invente.
Alors que le rideau de la nuit automnale vient de tomber, le public parisien se réfugie au
Backstage pour trouver un peu de lumière réconfortante. Par Aurélie Renault
RIVALS ouvrent la soirée. Encore enveloppées par la pénombre, leurs silhouettes se devinent à peine. Leur son, entre rage et douceur, traversé de blessures et d’étincelles, porte une force âpre. La voix de Kalie explose tel un cri dans le chaos, portée par la batterie de Josh. Les notes emportent le public comme une marée d’adrénaline et d’émotions brutes. Les refrains, douloureux et magnifiques, pareils à des cicatrices qui scintillent. Avec Rivals, on ne chante pas la douleur : on la sculpte pour qu’elle brille autrement, on ajoute du beau à la noirceur du monde. On y sent la solitude, la volonté d’exister, les désirs d’exister plus fort que nos peurs. C’est une musique qui regarde ses blessures droit dans les yeux et qui, malgré tout, les accepte et danse avec eux. Parce qu’y survivre est déjà une victoire à célébrer. Le public embrasse avec eux cette tension douce-amère : quelque part entre la rage et la tendresse, entre la chute et la renaissance. Le groupe quitte la scène, nous laissant plus forts, plus certains, plus entiers.
Puis vient NEVERTEL, véritable arc-en-ciel musical. Et nous découvrons la couleur de leur
musique se reflétant sur toutes nos pièces brisées, comme une boule à facettes, un
kaléidoscope. Leurs morceaux donnent du sens à ces blessures que nous devons de contempler et mettre à nu avec RIVALS.
Entre rock alternatif, accents hip-hop et EDM, le groupe diffuse une onde de joie à travers leurs titres, où chaque note semble courir après la suivante. Le nouvel album, Start Again, sert de fil rouge à cette traversée : une ode au recommencement, à ces lendemains qui osent se lever même quand tout s’est effondré. Les garçons chantent les yeux dans les yeux avec leur public et ne cesse de leur tenir la main, comme pour les remonter à la surface et leur éviter de sombrer dans la tristesse. Ils sont la main tendue nécessaire pour tenir bon. Les morceaux s’enchaînent comme des conseils bienvenus. Ceux de reprendre confiance en soi, de se concentrer sur son bien être (Back On Me), de ne pas prendre en compte les rumeurs (Did It All)… Starting Over est l’étincelle nécessaire au changement, et nous propose de tout cramer pour recommencer. On pourrait presque citer Jack Kerouac pour parler de cet instant : « mad to live, mad to talk (sing, ici), mad to be saved, desirous of everything at the same time, the ones who never yawn or say a commonplace thing, but burn, burn, burn like fabulous yellow roman candles exploding like spiders across the stars and in the middle you see the blue centerlight pop and everybody goes “Awww!” ».
Ce thème du feu se retrouve avec « Ever After » qui fait une promesse à ceux qui hésitent encore à s’embraser une ultime fois : il n’y a pas de fin, seulement des recommencements.
Les larmes des paroles se mêlent à la lumière de leurs morceaux solaires, si bien qu’un arc-en-ciel pourrait de former dans la salle. L’espoir est là, le calme après ces tempêtes intérieures. On pourrait même citer leur chanson Feed The Machine : « The perfect paradise / We followed in the dark /Until we saw the light ».
Et si les garçons rêvent de jouer avec Bring Me The Horizon un jour, ce soir ils nous ont en tous cas ouvert de nouveaux horizons, plein d’espoirs. Si Rivals ont rouvert les plaies, Nevertel les a recousues avec du fil doré. Et dans cette alchimie, un même message résonne, discret mais tenace : on peut toujours start again.
