Dans le caveau résonnant d’une petite salle rouennaise rappelant le mythique Klub parisien, c’est toute la diversité des musiques extrêmes locales qui s’est exprimée. Trois groupes, trois mondes : Ignis Tellus et son black death médiéval entraînant, Tragos et son death baroque théâtral, puis Cyphre et son old school death terriblement efficace. Le public, peu nombreux mais attentif, a vécu une soirée où l’intimité a transformé chaque set en une expérience singulière. Un Live-Report par HexMoon.
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Ignis Tellus – La flamme du metal noir pour ouvrir le bal.
Ignis Tellus a eu la lourde tâche d’ouvrir la soirée. Un pari relevé avec brio. Dès les premières notes, le ton est donné : riffs lourds, mélodies parfaitement audibles et travaillées, puisées dans leur album Ode. Le chanteur-guitariste mène le groupe avec assurance, épaulé par Mordorakk aux back vocals et guitar.
Les guitares, bien ajustées malgré un léger sifflement, se fondent dans une batterie dont la caisse claire renvoie directement au black traditionnel. Le résultat : un metal noir oscillant entre médiéval et roots, avec des accents clairs de Darkenhöld, mais assez personnel pour se démarquer. Le chant axé death metal y faisant pour beaucoup. Le public, encore clairsemé, se laisse embarquer par « Nous sommes de sa souche » véritable banger qui marque le set. Les scandes, tantôt graves tantôt aiguës, sonnent justes, et certains riffs flirtent avec un heavy metal poussé à l’extrême.
Au final, 45 minutes solides : un black entraînant, jamais édulcoré, qui installe Ignis Tellus comme une valeur montante. Au point de demander un « encore » !
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Tragos – Animateurs du chaos.
Avec Tragos, l’ambiance bascule vers un death metal décrit comme baroque, riche et théâtral. Les riffs sont imposants, les structures travaillées et l’atmosphère lourde : le groupe érige ses morceaux comme des fresques brutales. Le chant de Kevin est tour à tour guttural ou torturé. Il donne à l’ensemble une dimension vivante, presque ritualiste. Il semble être le maitre d’orchestre de la représentation. Autour de lui, les musiciens — un bassiste, un guitariste, un batteur — ne sont pas de simples accompagnateurs.
Chacun sert la densité du propos, sans esbroufe mais avec une implication palpable. La guitare cisèle des schémas sonores tranchants, souvent dissonants, parfois étrangement lumineux. Un set marquant, qui ordonne l’ambiance et l’univers du groupe.
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Cyphre – Le retour aux sombres catacombes.
Le retour aux sombres catacombes. En clôture, Cyphre ramène tout le monde à la brutalité du death metal old school. Le lieu s’y prête complètement de part son agencement et lumière. L’ambiance y est caverneuse et le plafond bas mettant en valeur une acoustique étouffée qui renforce l’oppression sonore du set, Les riffs sont tranchants, la voix caverneuse et la rythmique de la batterie sèche : ici, pas de détour, juste de l’efficacité directe. Le public, plus dense en fin de soirée, réagit avec une belle énergie à cette attaque frontale et fait savoir son enthousiasme au groupe. Le groupe montre qu’il joue sur les contrastes : passages plus nerveux, accents progressifs ou dissonants, moments où ça freine, morceaux qui respirent.
Un morceau comme Dawn par exemple offre un break lourd, presque lancinant, qui contraste avec les parties plus agressives. Un final brut et sans concession, parfait pour conclure cette montée d’intensité.
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Conclusion
De l’ouverture triomphante d’Ignis Tellus, déjà prometteuse et mélodiquement marquante, à la théâtralité de Tragos, puis à l’assaut frontal de Cyphre, cette soirée rouennaise a montré la variété et la force de la scène extrême locale. Peu importe la taille du public : l’intensité, elle, était bien au rendez-vous. Une preuve que la scène normande a plus que jamais son mot à dire dans l’extrême. A suivre de très près.